Au Salon mondial de l’immobilier Mipim, qui a débuté mardi et s’achèvera vendredi à Cannes (Alpes-Maritimes), un prototype de ville flottante aux Maldives concourt pour remporter un prix du meilleur grand projet. Cette cité n’a pas encore de nom mais consistera, assurent ses concepteurs, en un assemblage de plateformes flottantes au milieu d’un lagon de cet archipel dans l’océan Indien. Quelque 5.000 maisons colorées devraient s’y dresser.”Une ville flottante n’est pas un luxe, c’est une nécessité” pour ce pays insulaire dont l’existence même est menacée par le réchauffement climatique et la montée des océans, affirme à l’AFP Paul van de Camp, chef de l’entreprise néerlandaise Dutch Docklands, promoteur du projet. Et la capitale, Malé, où plus de 150.000 habitants se pressent sur un atoll de 8 km2 entièrement urbanisé, est complètement saturée, rappelle-t-il.Il ne s’attarde pas sur les caractéristiques techniques précises du projet, qui seront présentées officiellement au printemps par le président des Maldives. Ni sur leur coût. Mais il promet que le financement sera assuré et assure que les contraintes techniques ne sont pas rédhibitoires.”Il y a de très gros acteurs mondiaux qui nous ont aidés avec des systèmes pour l’énergie, les égouts, l’eau, l’électricité, qui ont été bien testés et sont relativement innovants”, assure Paul van de Camp.Il espère que le chantier sera terminé en 2027 au plus tard et assure avoir été approché pour répliquer l’expérience par “plusieurs pays”, sans préciser lesquels.
Des doutes sur la viabilité des projets
Il existe déjà des bâtiments flottants à travers le monde, de même que des villages traditionnels de pêcheurs sont construits sur l’eau, en Amazonie, Thaïlande ou Indonésie, souligne Paul van de Camp. Mais aucun projet moderne et de cette ampleur n’a encore vu le jour.Un autre est en préparation à Busan (Corée du Sud), piloté par l’entreprise Oceanix et soutenu par l’ONU-Habitat. Là aussi, les détails techniques, le coût, etc. n’ont pas encore été dévoilés. Ils le seront officiellement en avril, explique à l’AFP Itai Madamombe, fondatrice d’Oceanix. L’objectif est d’avoir terminé le chantier fin 2025.Des doutes subsistent cependant sur la viabilité de telles constructions.Pour Ayça Kirimtat, chercheuse à l’université tchèque de Hradec Kralove qui a longuement étudié les villes flottantes, l’obstacle économique est difficile à surmonter. “Construire de très grandes structures flottantes au-dessus du niveau de la mer coûte beaucoup plus cher que des immeubles normaux sur la terre”, explique-t-elle à l’AFP.Energie, transports, services, nourriture… la quantité de paramètres à prendre en compte est énorme, souligne-t-elle.”Je ne crois pas qu’il y ait un problème de technologie”, pense de son côté Nicholas Makris, professeur spécialiste des océans au Massachusetts Institute of Technology (MIT). “C’est plutôt l’efficacité économique. Réussir à tout faire d’une façon réalisable et viable économiquement”, dit-il.Quelque chose de possible dans un endroit suffisamment protégé des évènements climatiques extrêmes et des conditions hostiles de la haute mer.
‘Votre maison est toujours au-dessus du niveau de la mer”
Ce qui pourrait, in fine, rendre les villes flottantes attractives est la montée des eaux, qui menace les Etats insulaires mais aussi toutes les villes côtières, pense Chien Ming Wang, professeur de génie civil à l’université du Queensland (Australie).”Pour les villes côtières, si vous subissez les vagues et la montée des océans, vous n’avez pas d’autre choix que de supporter les dégâts et reconstruire. Donc c’est très coûteux”, explique ce spécialiste des villes flottantes, qui a été consulté pour le projet des Maldives.”Avec les villes et maisons flottantes, vous n’avez pas à vous préoccuper des inondations puisque votre maison est toujours au-dessus du niveau de la mer”.”On va voir les villes flottantes émerger partout dans le monde dans les dix ou vingt prochaines années”, prédit-il.